MA TERRE ENSEMENCEE
SEEDS IN MY GROUND

couverture seeds photo


Le 7 Juin 2019 :
Parution  du livre "Ma terre ensemencée, Seeds in my ground" de Jean Paira-Pemberton aux Editions des Lisières, dirrigées par Maud Leroy.
50 poèmes en anglais traduits et ré-écrits en français par l'auteure et Catherine Piron-Paira
Linogravure de la fleur sur la couverture : Albane Mosser.

Ci-joint la fiche technique.

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photo Sylvain Piron


Présentation de la lecture bilingue en musique:

C'est un chemin croisé, une rencontre entre :

  • la poésie de Jean-Mary Paira Pemberton, ma mère. Elle écrit en anglais, sa langue maternelle,
  • une version française des poèmes, traduction-ré/écriture par elle et moi,
  • la musique, voix, chants, portés par Sylvain Piron, moi-même et ponctuellement par Grégoire Mosser, petit-fils de l'auteure.

Un fil tissé entre trois générations, un voyage musical et linguistique ouvrant un espace hors du temps.
L'écriture de ma mère, est proche du conte.
Elle est ancrée dans le quotidien, elle témoigne d'une expérience.
L'air de rien, mine de rien, avec en arrière-fond ses connaissance en littérature anglaise et française, en linguistique, en histoire, en psychologie, en psychanalyse,
entre rythme et images,
voyageuse, nomade,
prise entre deux pays, deux cultures,
elle nous emmène vers d'autres horizons,
partageant sa réflexion sur la vie, son sens, son essence.

Durée : une heure à une heure quinze.

Public : tout public à partir de 10 ans

Article DNA du 08 01 2018 :
http://www.tradfrance.com/images/20180106_DNA.jpg

Montage vidéo de la présentation du 12 Mars 2022 à Truchtersheim :


Extrait audio de la lecture:

Boudry: Anglais - Français
Lons Le Saulnier : Anglais - Français
Aran : Anglais - Français

Ces extraits sont tirés du CD paru en juin 2020


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Ecouter l'émission de Radio Grand Ciel sur le livre et les éditions des Lisières, dirrigées par Maud Leroy.(semaine du 28 Octobre au 3 Novembre 2019)

Interview sur "Asymptote" : blog de littérature/poésie traduites en différentes langues:
lire l'article  (cliquer)


Présentation de l'auteure
:


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photo Sylvain Piron                


Jean Mary Paira Pemberton est née à Sandbach en Angleterre en 1930, dans une ferme du Cheshire.
Elle a fait des études de littérature anglaise en Angleterre puis est venue à Strasbourg comme lectrice d'anglais à la Faculté des Lettres en 1955.
Passionnée de linguistique, de psychanalyse et de phonétique, elle a enseigné sa langue maternelle pendant une quarantaine d'années.
L'écriture l'a toujours accompagnée.
Le livre "Selected Poems", publié par la revue Ranam de l'Université de Strasbourg en 2010, rassemble deux cent cinquante de ses poèmes.
Parmi les poètes qui l'ont marquée et inspirée, on retrouve Shakespeare, John Clare, John Donne, J.M Hopkins, et Goeffroy Summerfield.

Sylvain Piron :
Musicien, compositeur, chanteur, multi-instrumentiste, son instrument de prédilection est l'accordéon diatonique qu'il "tire-pousse" avec art et sensibilité.

Grégoire Mosser :
Pianiste, il compose et improvise avec finesse et talent.


Quelques poèmes de Jean, Mary Paira-Pemberton:


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gravure de Heidi Gioan-Herbener


BOUDRY
Perhaps with a ceremonious bow
I shall go past people in the street,
not knowing names
and haloed round
with a silence of my making.
Perhaps I shall enter houses,
not knowing whose
and laugh with people
or weep.
Or perhaps I shall do none of these things
but keep my peace in my own two hands,
waiting for my name to be called
that I may give names to others
and scatter my peace
and sow seeds in my ground.

BOUDRY
Avec une révérence solennelle,
je croiserai peut-être des gens dans la rue
sans connaître leurs noms
auréolée de mon propre silence.
Jʼentrerai peut-être dans des maisons inconnues
pour rire avec dʼautres
ou pour pleurer.
Ou peut-être je nʼen ferai rien
et garderai la paix
entre mes deux mains,
attendant quʼon mʼappelle par mon nom
que je puisse nommer les autres,
disperser ma paix
et ensemencer ma terre.


THE GARDENER
Dad’s life is full of names
Not that any of these people ever achieved anything,
simply because there were there,
landmarks in his own life.
Not one of them marked a mountain
or accomplished anything of note
He lives by his roses
the making of a flower-bed
lifting of tulips in the right season,
planning for spring,
feeding the birds.
Quiet, but wondering uneasily sometimes
what he left unsaid,
what words he did not cultivate
or watered too late.
I cannot blame.
The dead and the living are all the same.
We plough the past and hope for seeds to grow.

LE JARDINIER
La vie de mon père est remplie de noms.
Ces gens nʼont rien accompli de marquant,
Ils étaient simplement là, des repères de sa propre vie.
Aucune montagne nʼa porté leur nom.
Il vit grâce à ses roses,
semant au printemps,
nourrissant les oiseaux.
Tranquille,
mais, se demandant avec inquiétude, parfois,
quels mots il nʼa pas dits,
cultivés, ni arrosés à temps.
Je ne peux pas le lui reprocher.
Les morts et les vivants sont tous pareils.
Nous labourons le passé
et espérons que les graines pousseront.

GOING TO STRASBOURG IN THE EVENING
And suddenly wheat is knee high
above banks of poppy
and maize is already a jungle
where later one can get lost
in the dry husky whispering lanes.
The hops have not far to go
as they twine along the slanted poles
to make a summer tent.
In the cool silk of evening
the sun lies oblique
across this green and silver proliferation after rain,
When I come back, there will be full moon.

EN ROUTE POUR STRASBOURG LE SOIR
Soudain, le blé arrive aux genoux,
au-dessus des nappes de coqueliquots,
et le maïs ressemble à une jungle
où lʼon pourra se perdre plus tard
à travers les chemins secs qui murmurent.
Le houblon nʼa plus grand chose à faire
pour tisser les perches en tentes estivales.
Dans la fraîcheur soyeuse du soir,
le soleil éclaire dʼune lumière rasante
cette végétation luxuriante, verte et argentée,
qui suit la pluie.
A mon retour, la lune sera pleine.

COMING OFF THE DOVER FERRY IN AUGUST 1983
Before getting back into the car I walked over to the hedge
to pick a thistle. The sea was just as blue.
It was an automatic thing to do,
no intention behind it,
just this old habit of gathering moss, vegetation, a stone
later to be labelled - this summer’s places
where I have been.
«Why do you pick that ? It’s not a flower», he said.
«Yes, it is.»
«Can you tell the future, I mean, what will become of me?»
«No, of course I can’t,
if I could, I would not be here,
I would have built barricades, cut the ropes,
sent brigades of helicopters out,
unslung the harness in which they hung secure,
unfrozen the only possible present,
the one that is past.
«Do I look like a gipsy then?», I asked.
Yes, I did, with the black scarf, I had not even looked at,
an unthinking need to cover the hair,
St Paul somewhere in the background
and the homage of unadornment in a black dress.
We talked over the top of the car just in case,
you never can tell.
But there was no cause for alarm.
Unlovely and unlovable he was just aloneno
girl would look at him.
«I can’t write to me mum, she thinks I’m doing well»
What could I do?
Gave him the thistle.
«I can’t hold it», he said as he cupped it in his hand.
«It’s prickly».
«Yes», I said, « that’s life».
But I felt like Judas as I drove away.

EN SORTANT DU FERRY DE DOUVRES EN AOUT 1983
Avant de rejoindre ma voiture, jʼai marché jusquʼà la haie
pour cueillir un chardon bleu comme la mer.
Cʼétait un geste automatique, sans intention particulière,
si ce nʼest lʼhabitude de ramasser la mousse, des plantes,
des pierres pour les conserver en mémoire.
Tous ces lieux où je suis passée.
« Pourquoi cueillir ça ?», mʼa-t-il demandé, «ce nʼest pas une fleur !»,
«Si, cʼen est une !».
«Pouvez-vous dire lʼavenir? Me dire ce que je deviendrai ?»
«Bien sûr que non !»
Si je le pouvais, je ne serais pas là,
Jʼaurais érigé des barricades,
coupé la corde,
envoyé des escadrons dʼhélicoptères,
déssanglé le baudrier,
libéré de sa glace le seul présent possible,
celui qui a eu lieu.
« Jʼai lʼair dʼune gitane?»
Oui, avec mon foulard noir,
le besoin irréfléchi de couvrir les cheveux,
Saint Paul en arrière-fond,
lʼhommage de ma robe noire dans sa simplicité.
Je nʼy avais pas fait attention.
Nous avons parlé par-dessus la voiture,
au cas où, on ne sait jamais.
Mais il nʼy avait rien à craindre.
Ni beau, ni aimable,
il était juste seul,
aucune fille ne le remarquerait.
«Je peux pas écrire à ma mère, elle pense que je vais bien»
Que pouvais-je faire ?
Lui donner le chardon.
«Je ne peux pas le tenir», dit-il en le recueillant dans sa main.
«Ca pique !»
«Tout comme la vie !», jʼai répondu.
Mais, en mʼéloignant,
je me sentais, comme Judas, le trahir.


CHAPEAU CORNU
Sleep quietly while the night flows.
The sun lights so constantly,
lilac will soon be out.
Sleep quietly while the peacock grows,
the ducks sleep on the water,
a hen squawks, roosting on a branch.
From sky to sky,
the moon slides in all her cycles like our own,
the movement marks the rhythm of repose.
A hoof sounds in the stables,
a mouse slips in the hay,
a child creeps in my bed.
We’re all alike.
The companionable dark wipes out all difference.
Sleep quielty while the night flows.
In the morning we shall wake only a little older,
our fears slighter than before.

CHAPEAU CORNU
Dors tranquillement pendant que la nuit coule,
le soleil brille, fidèle à lui-même,
les lilas seront bientôt en fleur.
Dors tranquillement pendant que les paons grandissent,
les canards dorment sur lʼeau,
une poule crie, perchée sur sa branche.
Dʼun ciel à lʼautre,
la lune glisse, comme nous,
dʼun cycle à lʼautre.
Le mouvement scande le rythme du repos.
Un sabot résonne dans lʼécurie,
une souris file dans le foin,
un enfant se glisse dans mon lit.
Nous nous ressemblons tous,
lʼobscurité amicale efface toute différence.
Dors tranquillement pendant que la nuit coule
Au matin, nous aurons un peu vieilli,
nos peurs seront un peu moins fortes.


LONS LE SAUNIER
I saw the yellow moon rise
in the low part of the sky and thought :
I’ve still a long way to go.
Not that I thought, I’m going home.
There’s no such place I suppose
once out of childhood.
We might pitch our tents like nomads
just the same
and leave at break of day,
and the clear patch in the grass
would quickly green over,
wiping our trace away
or the signs of us disappear
under somebody else’s canvas.
Roll on our caravan,
however long the night.
Sign the bill and pay,
this is a bed we’ll never see again.
Inscribed upon thin air,
only the words remain.
The buildings are burned and the bricks walls vandalised,
the gardens are gone, the foundations buried,
and the land returned to the plough.
It’s a relief now to have no illusion
and carry the pilgrim staff on this Canterbury road
without altar or shrine.
And yet my pigeon instinct every year
drives me a thousand miles from this flat sea-less plain
to hear the sea-gull on my former shore
and over a dark field of grain
watch the slow rising of a yellow harvest moon.

LONS LE SAUNIER
Jʼai vu monter la lune rousse
et jʼai pensé : jʼai encore un long chemin à faire.
Je nʼai pas pensé : je rentre chez moi, à la maison.
Une fois sorti de lʼenfance, un tel endroit nʼexiste sans doute plus.
Nous pourrions monter nos tentes,
tout comme des nomades,
partir à lʼaube,
l’herbe repousserait rapidement,
effaçant nos traces.
Les signes de notre présence
disparaîtraient sous la toile de quelquʼun dʼautre.
Roule et roule notre caravane
aussi longue que soit la nuit.
Paye lʼaddition,
voilà un lit que nous ne verrons plus.
Inscrits dans lʼair insaisissable,
seuls les mots demeurent.
Les bâtiments sont brûlés,
les murs en brique vandalisés,
les jardins ont disparu,
les fondations sont enterrées
et la terre est retournée à la charrue.
Cʼest un soulagement de nʼavoir plus dʼillusion
et, sʼappuyant sur son bâton,
de marcher, pélerin, sur ce chemin
sans autel, ni lieu de culte.
A présent, mon instinct de pigeon voyageur
me pousse à mille lieues de cette plaine sans mer
pour entendre la mouette sur les rivages dʼautrefois,
et, par delà les champs de blés sombres,
regarder monter lentement la lune rousse des moissons.








Dernière modification le 08/03/2023